La journée internationale des femmes. A la fois « lieu de mémoire » et « non-lieu de mémoire »

(Der internationale Frauentag. « Lieu de mémoire » und « non-lieu de mémoire » zugleich)

La Journée internationale des Femmes occupe une place pour le moins modeste dans la mémoire collective française. Elle est néanmoins un des rares « lieux de mémoire » de l’histoire des femmes. D’un certain point de vue, elle peut également être considérée comme un « non-lieu de mémoire », optique que cet article se propose d’examiner.
L’idée de la Journée internationale des Femmes a été lancée lors de la Deuxième Conférence internationale des Femmes socialistes qui s’est tenue à Copenhague du 26 au 27 août 1910. Cette journée a été créée dans le but de lutter pour le droit de vote des femmes. A partir de l’année suivante, des journées similaires ont été organisées dans différents pays européens. En France, dans les années ’50, le Parti communiste français (PCF) a invente une autre origine à cette journée. Ainsi est ne le mythe de la grève des ouvrières de l’habillement à New York de 1857. Bien que le Mouvement des femmes des années ’80 ait dénonce cette construction falsificatrice, les réactions sont restées marginales.
Le fait d’avoir mis en relief l’origine ouvrière de la Journée internationale des Femmes est probablement l’une des raisons pour lesquelles on s’est peu intéresse pendant longtemps à l’histoire de la lutte pour l’obtention du droit de vote des femmes. En plus, dans la conscience de la population française, c’est de Gaulle qui, en 1944, a donne aux femmes françaises le droit de vote pour récompenser leurs mérites dans la Résistance. L’exemple de la Journée internationale des Femmes permet de montrer que la création ou noncréation d’un « lieu de mémoire » dépend fortement du pouvoir et de l’influence du groupe social intéressé ou encore de la conjoncture politique. L’étude de ces liens représente un défi que la recherche de l’histoire des femmes et le Mouvement des femmes doivent relever pour imposer avec succès leurs « lieux de mémoire ».

(Traduction: C. Gürcan)

Erschienen in: traverse 1999/1, S. 103