La pauvrété lièe au chômage dans l'ancienne confédération au bas moyen âge

(Eine neue Sicht arbeitsloser Armut in der spätmittelalterlichen Eidgenossenschaft)

Au bas Moyen Age, on relève un changement dans la perception de la mendicité.
Les développements socio-économiques ainsi que les disputes au sein de l’Eglise au sujet des ordres mendiants et des béguines ont changé le discours théologique sur le travail, la vie sans travail et la pauvreté. Au moment où les problèmes économiques sont ressentis comme une crise, des milieux laïcs influents reportent ce discours qui implique une certaine interprétation de la réalite sur la vie politique quotidienne. On peut très bien saisir ce glissement de la théologie à la politique sur le territoire de l’ancienne Confédération. La persécution des béguines à Bâle et le
traité du Zurichois Felix Hemmerli «Contre les mendiants valides» le mettent en évidence. La littérature de gueuserie représentée par des textes très importants et très précoces, constitue un autre aspect de ce nouveau discours. Elle se situe aussi bien dans une tradition littéraire qu’administrative et marque l’émergence d’une
nomenclature diffamatoire des faux mendiants aptes au travail que l’on considère, selon des stéréotypes de fourberie, comme une conspiration de gens organisés qui se créent une véritable profession d’une mendicité pratiquée avec astuces et techniques d’escroquerie. Le pas de ce discours diffamatoire à la répression est franchi
dans les sources juridiques et dans les décrets des Conseils et des «Tagsatzungen». La perception simplificatrice construit la réalité selon des contraires tels que travailleur-oisif, indigène-étranger, utile-inutile réductibles à la dichotomie fundamentale issue de la position de l’individu à l’intérieur ou en dehors du processus
de production. La présente contribution analyse la mise sur pied d’un système de répression et d’une politique à l’égard des pauvres sans-travail qui visaient à supprimer le vagabondage et la mendicité sur l’ensemble du territoire de l’ancienne Confédération. La nouvelle perception des pauvres et la politique qui se met en place à leur égard se sont déjà imposées bien avant la Réformation. Plus tard elles
ne devaient plus qu’être réunies, rationalisées et centralisées. La formation des confessions (Konfessionalisierung) a dès ce moment certes joue un rôle, mais le changement lent qui s’initie au XlVe siècle s’insère plutôt dans la logique de l’emprise de l’autorité qui se fait toujours plus vive et qui témoigne aussi du désir de tout surveiller, un désir d’ordre et de saine gestion, bref dans la logique de la Constitution d’un Etat moderne. C’est la raison pour laquelle le cadre de l’établissement d’une nouvelle «discipline sociale» (Sozialdisziplinierung) se prete mieux à une analyse des phénomènes ici décrits qu’à celui de la formation des confessions

(Traduction: Hans-Jörg Gilomen)

Erschienen in: traverse 1996/2, S. 117