Chanvre et Lin: Des matières premières traditionelles dans l'économie de la fin du Moyen Age et des temps modernes

(Hanf und Flachs. Ein traditioneller Rohstoff in der Wirtschaft des Spätmittelalters und der frühen Neuzeit)

À l’appui de deux plantes, le lin et le chanvre, nous entendons exemplifier une approche transdisciplinaire entre botanique et histoire. Nous appréhendons par ailleurs l’histoire de l’environnement comme une synthèse procédant de la combinaison de problématiques archéo- botaniques, agraires, économiques, sociales et historiques. La culture du lin (linum usitatissimum) et du chanvre (cannabis sativa L.) a pris de l’extension depuis la fin du Moyen Âge. Au XVIe et au début du XVIIe siècles, la demande de matières premières destinées à la production textile s’est renforcée sous l’influence de l’industrie urbaine et du commerce. À la campagne, des familles, le plus souvent issues de la petite paysannerie, produisent du lin et du chanvre qui peuvent être utilisés à de multiples fins. Ces plantes sont cultivées dans les jardins, dans les enclosures et dans d’autres aires spéciales ainsi que sur des terres laissées en jachère, où la culture du lin en particulier est intégrée à un système d’assolement triennal, tandis que le chanvre, en raison de son mode de culture aisé, peut être cultivé, année après année, sur la même terre.
Le lin et le chanvre ne fournissent pas seulement des fibres, mais également des semences oléagineuses, des substances alimentaires, riches en protéines, qui jouent un rôle important comme aliments, remèdes et matières premières industrielles. Pourquoi et dans quel but les paysans et les paysannes ont-ils privilégié tantôt le chanvre tantôt le lin? Cette question na pas été posée dans les études d’histoire économique et agraire. En revanche, les facteurs qui ont influé sur la préférence donnée à l’une ou l’autre de ces deux plantes ont été mis en évidence: particularité du sol, structure de production de l’entreprise, utilisation dans la propre famille des biens produits ou production destinée à l’industrie de la toilerie, à la corderie ou à d’autres industries spécialisées. Conjointement à la finalité de la production, la qualité du domaine, les conditions atmosphériques, la nature du sol, la densité de la plantation et le degré de maturité ont influencé la qualité des fibres. La toile de chanvre sest révélée être l’« étoffe du pauvre » tandis que la toile de lin dans le centre de toilerie saint-galloise doit satisfaire aux critères de qualité les plus élevés.

(Traduction: Chantal Lafontant)

Erschienen in: traverse 1997/2, S. 100