La Réforme catholique comme pratique sociale. La logique d'action de l'évèque de Coire au 17e siècle

(Katholische Reform als soziale Praxis. Handlungslogiken eines Churer Bischofs im 17. Jahrhundert)

Si l’on en croit le nonce papal en Suisse, l’évèque de Coire Johann VI Flugi von Aspermont (1636-1661) était tout sauf un évèque exemplaire: il construisit des palais immenses, amassa pour lui même et sa famille une richesse considérable et fit commerce des places réservées pour la formation des futurs prêtres. En agissant de la sorte, l’évèque ne respectait pas les recommandations du Concile de Trente (1545-1563), selon lesquelles un évèque se devait, en tant que berger spirituel, d’agir exclusivement au service de la rénovation de l’Eglise et de la religion. Cette contribution souligne que les pratique critiquées par le nonce n’étaient pas seulement conciliables avec l’esprit du Concile mais constituaient paradoxalement une condition préalable indispensable pour la Réforme catholique dans l’évéché de Coire. Afin de mieux comprendre cette situation, la contribution décrit et analyse les pratiques de l’évèque en les replaçant dans le contexte des logiques d’action des individus à l’ère moderne. Le statut social d’acteurs comme l’évèque de Coire dépendait ainsi de l’influence de liens familiaux dont il fallait alimenter le capital social et réputationnel. Le prestige social ainsi constitué permettait à son tour l’établissement de relations de loyauté (par le biais du patronage et du clientélisme) qui servaient à influer sur les évolutions politiques et culturelles. Si, comme c’était le cas à Coire, les fondements institutionnels et matériels permettant d’implémenter sans délai les réformes faisaient défaut, de tels mécanismes d’interconnexion sociétales devenaient dès lors d’autant plus précieux pour les acteurs ecclésiastiques.

(Übersetzung: Matthieu Leimgruber)

Erschienen in: traverse 2015/2, S. 156