Les besoins insatiables d'énergie à la fin du boom économique. Le projet de construction d'une centrale nucléaire de la BASF à Ludwigshafen, 1969-1976

(Ungestillter Energiehunger am Ende des Booms. Der geplante Bau eines Atomkraftwerks bei der BASF in Ludwigshafen, 1969–1976)

Après la Seconde Guerre mondiale, les sociétés industrielles européennes connurent une période de haute conjoncture de près de trente ans, caractérisée par la percée de la production industrielle de masse et par une augmentation exponentielle de la consommation d’énergie. Dans la République fédérale d’Allemagne des années 1950, l’énergie nucléaire incarnait la technologie du futur et l’industrie chimique, grande consommatrice d’énergie, en était une partisane convaincue. La compétition internationale croissante et la hausse des prix de l’énergie survenue à la fin du boom économique placèrent les entreprises chimiques d’Allemagne de l’Ouest devant un gigantesque défi. Pour parer aux coûts croissants de l’énergie et réduire sa dépendance à l’égard du pétrole brut, la BASF (Badisch Anilin und Soda Fabrik), leader mondial de l’industrie chimique, proposa en 1969 de construire sa propre centrale nucléaire. Alors que le gouvernement du Land de Rhénanie-Palatinat se rallia au projet, les ministères compétents à Bonn exprimèrent de grandes réserves par rapport à la construction d’une centrale nucléaire au sein d’un complexe industriel à proximité immédiate d’une grande ville (Ludwigshafen). Même si toutes les fractions du Bundestag étaient d’accord de miser sur le nucléaire pour pallier le manque pronostiqué d’électricité, un processus de négociation de plusieurs années débuta. Les coûts des matières premières et de l’énergie augmentèrent une fois encore considérablement avec la première crise pétrolière de 1973 et le projet ne sera finalement jamais réalisé: les coûts d’investissements plus élevés dépassaient nettement les économies attendues. L’article commence par exposer le déroulement de la négociation, de la proposition de construction au premier choc pétrolier, puis met en lumière, sur fond de hausse des prix de l’énergie, les positions partiellement antagonistes des différents ministères et commissions de sécurité.

Erschienen in: traverse 2013/3, S. 112